Fundamental Review of Trading Book FRTB

Auteurs : Philippe BANKUE – Karima HELLAL – Carole HEUDES

I. Introduction

La revue fondamentale du portefeuille de négociation (Fundamental Review of the Trading Book – « FRTB ») est un ensemble de normes porté par la réglementation bancaire internationale « Bâle IV » (ce nom n’étant pas encore officiellement été donné par le régulateur) établie par le Comité de Bâle. Celle-ci faisant suite à la dernière réforme « Bâle III » rentrée en vigueur en 2013.

Tandis que Bâle III revoyait essentiellement le niveau minimal de fonds propres exigée pour une institution financière, les évolutions impactent essentiellement le dénominateur du ratio de solvabilité et donc plus particulièrement le risque de crédit, le risque de marché ainsi que le risque opérationnel. Un accent par conséquent sur les actifs à risque pondéré (RWA : Risk Weighted Assets).

Le programme FRTB, publié par le Comité de Bâle en janvier 2016 et dont l’entrée en vigueur est prévue pour janvier 2019 porte sur les principaux points suivants :

  • La révision de la frontière entre le portefeuille de négociation et le portefeuille bancaire
  • La révision de l’approche des modèles internes via le changement d’indicateur de marché : remplacement de la « Valeur à Risque » (en anglais Value at Risk ou VaR) qui définissait la perte potentielle maximum pour un seuil de confiance égal à 99% sous Bâle III par la « perte attendue » (plus communément appelée en anglais Expected Shortfall ou ES) correspondant à la perte moyenne au-delà des 99% jugée plus représentative.
  • La revue de l’approche standard plus sensibles aux risques avec la prise en compte du risque d’illiquidité sur les marchés utilisés

Avec pour principaux impacts :

  • Le renforcement des contrôles de risques
  • L’augmentation des fonds propres des institutions financières
  • Adaptation des stratégies en fonctions des derniers calculs de fonds propres

 

II. De Bâle I à Bâle IV

  • 1974Création du Comité de Bâle :

La faillite de la petite banque allemande Herstatt entraîne la création de ce comité par les gouverneurs des banques centrales des dix plus grandes puissances industrialisées. Ce comité qui compte aujourd’hui 28 pays a pour objectif premier l’amélioration de la stabilité du système bancaire international, lui-même garant de la stabilité d’un système financier de plus en plus internationalisé.

  • 1988 : Bâle I et premier ratio de solvabilité :Caractérisé principalement par le premier ratio de solvabilité (ratio de Cooke). Le ratio du niveau des engagements d’une banque (crédits et autres placements) et du montant de ses fonds propres doit être au moins égal à 8%. De façon triviale, cela signifiait que pour prêter un total de 100 millions d’euros une banque devait avoir au minimum 8 millions d’euros de fonds propres pour être considérée comme solvable.
    • Limite : la diversification et la complexification des produits financiers et donc les traitements hors-bilan de ceux-ci a rendu obsolète ce ratio.
  • 2004Entrée en vigueur des accords de Bâle II

Cet enrichissement de Bâle I repose sur 3 piliers fondamentaux :

  • Pilier I:
    • Revue des exigences minimales de fonds propres : Redéfinition du ratio de Cooke en ratio de McDonough par la prise en compte de risques supplémentaires : risques de marché et les risques opérationnels
    • Division du ratio de solvabilité en fonction de la nature de fonds propres : 1er ratio « Tier I » au moins égal à 4% (actions, bénéfices non distribués et d’obligations à caractère perpétuel) et 2e ratio « Tier II » au moins égal à 4%
    • Définition du risque de défaut d’une contrepartie via la mise en place du calcul d’une probabilité de défaut et d’un taux de perte
  • Pilier II: Procédure de surveillance prudentielle :
    • Mise en place des suivis en interne des calculs de risque et des besoins en fond propre
  • Pilier III: Discipline marché
    • Accroissement de la communication publique sur les actifs et la gestion interne des risques pris par les banques
    • Uniformisation des pratiques bancaires
  • 2013 : Entrée en vigueur des accords de Bâle III

Implémentée suite à la crise des « subprimes » de 2008 qui a soulevé une insuffisance de la capitalisation des banques et du manque de liquidité que les banques pouvaient générer ;

  • Renforcement du seuil de solvabilité des banques : Redéfinition des fonds propres « Tier I » au moins égal 6%
  • Nouveau ratio d’effet de levier (possibilité pour une banque d’emprunter de l’argent pour spéculer et espérer ainsi démultiplier les gains tout en augmentant les risques)
  • Implémentation de deux nouveaux ratios de liquidité :
    • Ratio de liquidités à court terme (Liquidity coverage ratio ou LCR) calculé pour que les banques puissent survivre avec leurs propres liquidités pendant 1 mois
    • Ratio de liquidités à long terme (Net Stable Fundle Ratio ou NSFR) qui permet à une banque de survivre pendant 1 an dans un contexte de crise
  • 2019 : Date prévisionnelle d’entrée en vigueur de la réforme Bâle IV

Evolution des risques par rapport à Bâle III :

  • Risques de crédit : revue de l’approche standard crédit en faisant recours aux notations externes et par la mise en place de planchers (floors) en dessous desquels les RWA ne peuvent pas descendre lorsqu’ils sont calculés via les modèles internes
  • Risques opérationnels : nouvelle approche de mesure standardisé (Standard Measured Approach – SMA)
  • Risques de marché : revue fondamentale du portefeuille de négociation (Fundamental Review of the Trading Book – FRTB)

 


III. Les piliers de FRTB

Ce programme qui consiste à mettre en place des dispositifs pour accroître les exigences de couverture au regard du risque de risque de marché repose sur 3 piliers :

1. Révision de la frontière entre le portefeuille de négociation et le portefeuille bancaire

Le portefeuille bancaire (en anglais « banking book ») d’une banque correspond à l’ensemble des instruments qu’elle détient et qui ont vocation à être détenus par la banque jusqu’à leur échéance, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas négociés sur le marché financier. La plupart des transactions à moyen et long terme sont enregistrées dans le portefeuille bancaire.

Exemple d’instruments financiers du banking book : valeurs mobilières, parc immobilier et industriel

Le portefeuille de négociation (en anglais « trading book ») d’une banque se réfère quant à lui à l’ensemble des actifs de la banque qui sont amenés à faire l’objet de négociations financières (achat/vente) sur le marché à court/moyen terme.

Exemple d’actifs du trading book : instruments dérivés (Swap, Forward, Future)

Les exigences en capital diffèrent selon le portefeuille où se situe l’actif. Les risques liés à un actif du banking bookrelèvent du risque de crédit, tandis que les risques liés à un actif du trading book sont d’ordre risque de marché.

Avec la crise des subprimes, les banques se sont retrouvées avec des actifs bloqués en portefeuille de négociation, d’où ils ne pouvaient tirer aucune liquidité faute d’acheteur.

Rappel : Les supbrimes sont des prêts immobiliers à taux variables dont la valeur dépend du prix du bien acheté (plus celui-ci est élevé, plus le taux est faible). Inversement, plus le bien est faible, plus le taux est élevé. Les entreprises qui ont accordé les prêts les ont majoritairement revendus sous forme de titre (c’est ce qu’on appelle la titrisation) à d’autres banques, auxquelles sont reversées le remboursement du prêt par les emprunteurs initiaux.

Ainsi les banques américaines et européennes se sont retrouvées avec un grand nombre de subprimes qu’elles ne pouvaient pas liquider. Avec un nombre important d’actif bloqué dans le trading book, elles doivent alors vendre des actions pour réaugmenter leur réserve monétaire. Les pertes en fonds propres sont importantes.

Afin de faire en sorte que les banques soient davantage capitalisées en fonds propres au regard du risque des marchés, le programme FRTB a mis en place plusieurs mesures pour renforcer la frontière entre le trading book et le banking book. Cela consiste à :

  • Redéfinir la liste des instruments financiers qui peuvent figurer dans le trading book ou devant en être exclus afin de couvrir le risque de marché avec les actifs les plus appropriés
  • Etablir des règles afin de limiter les transferts d’actifs du portefeuille de négociation vers le portefeuille bancaire.

 

 

1.1 Redéfinition de la liste des instruments financiers autorisées dans le trading book

La liste des instruments financiers qui peuvent couvrir au mieux les risques de marché :

 

1.2 Etablissement des règles de transfert d’un instrument financier du portefeuille de négociation vers le portefeuille bancaire

Afin de d’augmenter les exigences en fonds propres au regard du risque de marché, les règles de transfert d’un actif du portefeuille de négociation d’une banque vers son portefeuille bancaire ont été durcies.

En effet, la banque devra d’abord faire une demande de transfert auprès de son autorité de contrôle (ACPR en France) si l’instrument financier respecte au moins l’un des critères suivants :

  • Actifs et passifs détenus à des fins de transaction pour des raisons comptables ;
  • Provenant d’activités de tenue de marché ;
  • Participations dans des fonds ;
  • Actions cotées ;
  • Transactions assimilables à des pensions en relation avec le portefeuille de négociation ;
  • Options

Si l’autorité de contrôle refuse d’accorder son approbation pour le transfert, l’instrument financier devra rester dans le portefeuille de négociation.

Enfin, la banque a le devoir de mettre à jour et rendre public la liste des instruments financiers qu’elle détient et qui ont fait l’objet d’un transfert du trading book vers le banking book.

 

2. Revue de l’approche fondée sur les méthodes internes (AMI)

Tandis que l’approche fondée sur la méthode standard consiste à appliquer les systèmes de notation fournis par les organismes externes telles que les agences de notation (Standard & Poor’s, Moody’s), l’approche fondée sur les méthodes internes repose sur des méthodologies de notation internes et propres à chaque banque pour déterminer les exigences en fond propre par rapport au risque de crédit.

Afin d’accroître les exigences de fonds propres au regard des risques de marché, les méthodes internes de calcul de risques ont été revues.

 

2.1 Validation de l’approche modèle interne par trading desk

Pour rappel, chaque banque peut définir plusieurs bureaux de négociation (trading desk) avec l’approbation préalable de l’autorité de contrôle. Un trading desk désigne un groupe d’opérateurs ou de comptes de négociations. Ceux-ci ont pour rôle de mettre en pratique une stratégie purement opérationnelle définie dans le cadre d’une gestion des risques délimitée.

Ainsi, l’approbation d’un modèle interne dans une banque passe par plusieurs étapes :

  • c’est en premier lieu à l’autorité prudentielle de la banque d’approuver le modèle interne qu’elle propose pour calculer ses exigences en fonds propres au regard du risque de marché.
  • ensuite, avec l’implémentation de FRTB, chaque banque pourra approuver ou rejeter au cas par cas les modèles internes définis par ses différents trading desk.

Si le modèle interne défini par un trading desk est validé par la banque, ce modèle devra être en dernier lieu approuvé par le trading desk. Ce bureau devra satisfaire à tout moment les exigences en matière d’attribution des profits et pertes et de contrôles. Il devra également reporter de manière régulière des calculs effectués via son modèle interne.

 

Remplacement de la Value at Risk par l’Expected Shortfall

La « Valeur à Risques » (Value at Risk ou VaR) correspond à la perte potentielle maximale d’un investisseur sur la valeur d’un actif ou d’un portefeuille d’actifs qui peut être atteinte sur un horizon donné pour un certain niveau de confiance.

Exemple : Supposons que la VaR est égale à 100 millions d’euros, avec un seuil de confiance à 99% à 10 jours, cela signifie qu’il y a 99% de chance pour que la perte associée à cet actif n’excède pas les 100 millions d’euros sur les 10 prochains jours.

Dans cet exemple, le danger repose donc sur le fait que sur un portefeuille donné, le trader est sûr que la probabilité à 99% que la perte journalière ne dépassera pas 100 millions d’euros sur les 10 prochains jours. Toutefois sur les 1% restant, la perte peut être supérieure à 100 millions, par exemple 500 millions d’euros : cela n’est pas acceptable pour la banque.

La mesure de la VaR n’indique donc rien de la distribution des pertes au-delà du seuil de confiance.

Elle ne prend pas en compte les pires scénarios (appelés « queues de distribution ») où les chocs financiers peuvent engendrer des pertes considérables pour les banques. De plus, la mesure de la VaR n’est pas cohérente : elle n’est pas sous-additive. Une mesure de risque sous additive prouve que le risque calculé sur deux portefeuilles réunis est inférieur à la somme de chaque risque calculé sur chaque portefeuille. La VaR ne prend donc pas en compte la diversification du portefeuille.

L’Expected Shortfall (ES) quant à elle correspond à la moyenne des pertes subies lorsque la banque se trouve dans les pires scénarios (dits encore « période stressée »).

Exemple : une Expected Shortfall de 10 M€ à 10 jours et 97,5% signifie que sur 10 jours un portefeuille a une probabilité de 97,5 % de supporter une perte moyenne 10 M€.

Pour un même seuil de confiance donné, l’ES sera toujours supérieur à la VaR. C’est pourquoi, par rapport au Bale 2.5, dans FRTB, l’Expected Shortfall à 97,5 % sur 10 jours remplacera la VAR à 99 % sur10 jours pour que la banque ait une réserve plus solide pour anticiper à la crise financière.

 

Remplacement de l’IRC (Incremental Risk Charge) par la DRC (Default Risk Charge)

La VaR ne prend pas en compte le risque de défaut immédiat des contreparties lié aux instruments détenus par les banques dans leur portefeuille de négociation. Elle capture uniquement les pertes qui proviennent des variations de marché sur un horizon de 10 jours, avec une probabilité de 1 %.

Contrairement à la VaR, l’IRC cherche à capturer les pertes issues de défauts immédiats sur un horizon d’un an avec une probabilité de 0,1 %. Les chocs pris en compte sont ainsi plus sévères, mais aussi plus rares. Le périmètre d’application de l’IRC correspond aux crédits « vanille », en particulier les positions sur les obligations et les CDS, souverains ou d’entreprise, détenues dans le portefeuille de négociation.

Dans le cadre de FRTB, L’IRC sera remplacée par la charge en risque de défaut (Default Risk Charge ou DRC) qui prendra en compte en plus les activités sur les actions.

 

Capitalisation supplémentaire des fonds propres liés aux facteurs de risque non modélisables

Un facteur de risque de marché pour une banque correspond à un évènement financier -comme la volatilité de certains prix- qui influe sur l’évolution du taux, cours ou prix de marché d’un actif de son portefeuille de négociation. Il impacte directement la valeur des actifs présents dans le portefeuille de négociation de la banque. Il sert donc ainsi de paramètre d’entrée à la modélisation des risques de gain ou de perte sur ce portefeuille.

La modélisation des risques (VaR, ES) reposant sur des modèles mathématiques complexes incluant des lois de probabilité, ces paramètres doivent être numériques (prix ou autre) et continus pour être utilisés par ces méthodes avancées. Ainsi, un facteur de risque de marché est considéré comme « modélisable » s’il peut servir de paramètres d’entrée aux méthodes mathématiques utilisés pour anticiper l’évolution de gains ou de pertes d’un portefeuille de négociation.

FRTB précise en complément qu’un facteur de risque est modélisable par une banque s’il réunit les conditions suivantes :

  • Il doit exister au minimum 24 prix réels observables par an, avec au maximum 1 mois entre 2 prix observés ;
  • La banque doit pouvoir justifier le caractère « réel » des prix observés : par exemple en prouvant que le prix provient d’une transaction réalisée par la banque.

Avec un nombre suffisant de prix réels observés sur un instrument financier négocié par la banque, celle-ci pourra simuler divers scénarios et anticiper les risques financiers liés l’évolution du prix de ce titre.

La difficulté pour les banques est donc de collecter suffisamment de « bons prix » issus de transactions réalisées sur le marché pour modéliser les facteurs de risques. Ainsi, les facteurs de risques qui ne disposent pas d’assez « bons » prix, sont considérés comme non modélisables (Non Modellable Risk Factors ou NMRF).

Chaque facteur de risque non modélisable est soumis à un stress test calibré avec le même seuil de confiance que celui de l’ES pour les facteurs de risques modélisables. Ce stress test permet de déterminer les exigences en fonds propres découlant des facteurs de risque non modélisable.

 

3. Revue de l’approche fondée sur les méthodes standards

Les fonds propres requis par l’approche standard sont la somme arithmétique de trois éléments :

  • les fonds propres en regard du risque imposés par la méthode des sensibilités
  • les fonds propres qui doivent couvrir le risque de défaut
  • les fonds propres qui doivent la majoration pour risque résiduel

L’approche se focalise sur les trois points suivants :

  • la sensibilité aux risques,
  • la charge pour risque de défaut. En anglais Default Risk Charge (DRC),
  • la majoration pour risque résiduel. En anglais Residual Risk Add-On (RRAO)

 

3.1 Approche basée sur la sensibilité

    Définitions

L’exigence des fonds propres à partir de cette approche exige une prise en compte de la sensibilité́ linéaire et non linéaire au risque. Ainsi, la charge de risque associé se calcule par agrégation de trois mesures de risque différentes :

  • Delta : une mesure du risque basée sur les sensibilités du portefeuille de négociation d’une banque au de risque delta réglementaire.
  • Véga : Une mesure du risque qui est également basée sur les sensibilités au risque véga réglementaire. Tout comme le risque delta, il est aussi linéaire.
  • de Courbure : mesure du risque qui prend en compte le risque additionnel non pris en compte par le risque delta. C’est un risque non linéaire.

Rappel : Un instrument est dit linéaire si sa fonction de payoff (résultat à l’échéance en fonction de la valeur de marché du sous-jacent) est linéaire ou quasi-linéaire. Ces instruments incluent les positions spot, forward et futures. Les instruments non linéaires incluent les options, les dérivés exotiques et les obligations avec option (produits hybrides).

Ces exigences de fonds propres en regard de la sensibilité aux risques delta, vega et de courbure se fait au sein d’un ensemble prédéfini de risques :

  • Le risque lié au taux d’intérêt global (TIG)
  • Le risque lié aux actions
  • Le risque lié aux matières premières
  • Le risque lié au taux de change
  • Le risque lié aux écarts de crédit (CSR en anglais)
    • CSR non titrisables
    • CSR titrisables portefeuille de négociation corrélé (CTP en anglais)
    • CSR titrisables portefeuille de négociation non corrélé (n-CTP)

Le calcul des risques delta et vega est exigé aux banques aujourd’hui uniquement pour les options, mais avec la FRTB ces calculent seront nécessaires et obligatoires pour d’autres types de produits.

Pour le risque de courbure, deux scénarios de stress doivent être calculés par facteur de risque (choc à la hausse et choc à la baisse). L’effet du facteur delta, déjà pris en compte dans l’exigence de fonds propres en regard du risque delta, est éliminé. Les deux scénarios sont soumis à des chocs de pondération des risques, et la perte extrême est agrégée.

Les données permettant aux banques de calculer ces différentes variables existent surement dans leur système d’information actuel, mais la tâche qui s’avère compliquée est de pouvoir la retrouver et l’extraire vu la complexité des systèmes déjà en place et leurs manques de flexibilité.

Exigence pour risque de défaut

Le calcul de l’exigence de fonds propres en regard du risque de défaut dans le cadre de l’approche standard repose sur une procédure à plusieurs étapes. La première étape consiste à calculer le montant des pertes JTD pour chaque instrument soumis au risque de défaut ; dans un deuxième temps, la compensation des pertes JTD entre expositions longues et courtes sur un même débiteur (lorsque cela est autorisé) permet de calculer le montant net des positions longues et courtes sur les différents débiteurs ; dans un troisième temps, le montant net des expositions courtes est actualisé à l’aide du ratio du bénéfice de la couverture ; enfin, des coefficients de pondération du risque de défaut sont appliqués pour obtenir l’exigence de fonds propres

Majoration pour risques résiduels

Un risque résiduel est un risque qui subsiste après élimination des autres risques par des contrôles internes ou autres. Ainsi, La majoration pour risque résiduel est la somme arithmétique des montants notionnels bruts des instruments présentant des risques résiduels, multipliée par un coefficient de pondération des risques de 1,0 % pour les instruments adossés à un sous-jacent exotique et par un coefficient de 0,1 % pour les instruments assortis d’autres risques résiduels.

Instruments concernés par les risques résiduels

Les instruments qui sont soumis à cette majoration respectent les critères ci-dessous :

  • Les instruments adossés à un sous-jacent exotique (le risque de longévité, le risque météorologique et de catastrophe naturelle, ainsi que la volatilité effective future) sont des instruments du portefeuille de négociation dont l’exposition sous-jacente n’est pas soumise, quelle que soit la catégorie de risque, au traitement des risques delta, vega et de courbure dans la méthode des sensibilités, ni à l’exigence de fonds propres pour risque de défaut dans l’approche standard.
  • Les instruments assortis d’autres risques résiduels sont ceux qui remplissent les critères ci-dessous :
    • les instruments du portefeuille de négociation soumis à l’exigence de fonds propres pour risque vega ou risque de courbure et dont le remboursement ne peut être exprimé ou parfaitement imité sous la forme d’une combinaison linéaire finie d’options classiques reposant sur un seul et même sous-jacent – cours d’action ou de produit de base, taux de change, prix d’obligation, cours de CDS ou swap de taux ;
    • les instruments correspondant à la définition du portefeuille de négociation en corrélation sauf lorsque ces instruments sont comptabilisés, aux termes du dispositif régissant le risque de marché, comme couverture de risque éligible au sein du portefeuille de négociation en corrélation.

Définition des autres risques résiduels

  • Risque de décalage : risque de variation importante des facteurs vega des options, due à de légères variations du sous-jacent, entraînant un glissement de la couverture.
  • Risque de corrélation : risque de variation d’un coefficient de corrélation nécessaire pour calculer la valeur d’un instrument à sous-jacents multiples.
  • Risque de comportement : risque de variation du résultat de l’exercice de l’option ou de son remboursement anticipé, par exemple dans le cas d’un emprunt immobilier à taux fixe au sujet duquel la clientèle de détail prend ses décisions en fonction de facteurs autres que le seul gain financier (critères démographiques ou autres facteurs sociaux).

 

IV. Les élements changés de l’approche standard avec l’entrée en vigeur de la FRTB
  • Comme cité précédemment mesure basée sur les sensibilités est plus complexe à mettre en œuvre que l’approche actuelle : c’est d’ailleurs l’un des points qui posent beaucoup de difficultés aux banques en termes de mise en œuvre opérationnelle, y compris pour les grandes banques d’investissement ;
  • Les portefeuilles de titrisation et de corrélation (ABS, CDO, etc) sont désormais obligatoirement traités en approche standard ;
  • Une approche plus sophistiquée basée sur les sensibilités des facteurs de risque afin de capturer de manière adéquate les risques spécifiques sur certains produits complexes. L’exigence en capital provenant de la SBA (« sensibilities base approach » ou « approche basée sur les sensibilités ») inclut
    • une prise en compte spécifique des sensibilités au risque des transactions ayant des remboursements non linéaires (qui se traduisent par une surcouche additionnelle en capital pour couvrir ce risque). La mise en place de cette surcouche a été l’un des points les plus discutés par l’industrie bancaire car elle s’avère très pénalisante en fonds propres pour les banques
    • une exigence en capital pour le risque de défaut (« DRC » ou Default Risk Charge »)
    • une majoration au titre du risque résiduel (« RRA » ou « Residual Risk Charge »), pour décourager les opérations « exotiques »,
  • L’approche standard doit désormais être calculée et reportée sur tout le périmètre, c’est-à-dire même pour les portefeuilles pour lesquels une approche en modèle interne est approuvée par le régulateur.

 

V. Impacts de FRTB pour les banques

Impacts de l’évolution des méthodes internes

La revue des modèles de méthodes internes impacte la structure de la banque d’un point de vue gouvernance, gestion des risques, processus opérationnel et enfin au niveau des systèmes d’information.

  • Apports de FRTB pour les banques
    • Autonomie croissante des banques par rapport aux autorités de contrôle : la banque pourra désigner en interne ses propres trading desk (appelés trading desk de second rang) sans qu’une approbation des autorités de contrôle de la banque soit nécessaire ;
  • Renforcement du pouvoir des trading desks : chaque trading desk pourra définir ses propres méthodes internes (dans la limite de la réglementation) et les faire approuver par ses propres équipes ;
  • Résistance des banques accrue en cas de crise financière : la banque pourra survivre plus longtemps avec des exigences en fonds propres plus importantes ;
  • Augmentation de la diversification des risques : l’Expected Shortfall étant une mesure cohérente, la banque pourra diminuer les risques de son portefeuille de négociation en variant le type d’actifs détenus dans son trading book ;
  • Accroissement de la liquidité des banques : la banque pourra liquider des positions plus rapidement en cas de force majeure avec une redéfinition plus stricte des actifs éligibles au trading book;

 

  • Freins à la mise en place de FRTB dans les banques :
    • Au niveau gestions de gestions de risques :
      • Approfondissement des analyses des instruments financiers et des facteurs de risques : les banques devront étudier plus en profondeur les actifs pour distinguer ceux qui peuvent être liquidés rapidement en cas de crise et aussi récolter davantage d’informations sur les facteurs de risques pour en rendre le plus possible modélisable via la méthode de l’Expected Shorfall.

 

  • En termes de processus opérationnel :
    • Génération de reporting réglementaire au niveau des trading desk : Chaque trading desk devra produire au moins une fois par semaine des rapports liés aux profits et pertes liés au portefeuille de négociation dont elle a la charge.

 

  • En termes d’infrastructure sur les systèmes d’information :
    • Augmentation de la capacité de calcul : l’ES nécessite un nombre scénarios de stress test
    • Historisation plus massive des données afin de récolter assez de données pour rendre un plus grand nombre de facteurs de risque modélisable

 

  • En termes de coût : charge en capital (coûts élevés des tests liés aux facteurs de risque non modélisable qui nécessitent de collecter des données plus complexes et plus rares)

 

VI. Lexique

FRTB : Fundamental Review of the Trading Book

AMI : Approche fondée sur les Méthodes Internes

MMI : Méthode des Modèles Internes

IRB : Internal Rating-Based

VaR : Value at Risk

ES : Expected Shortfall

NMRF : Non Modellable Risk Factor

IRC : Incremental Risk Charge

DRC : Default Risk Charge

BRI : Banque des Règlements Internationaux

BIS : Bank for International Settlements

BCBS : Basel Committee on Banking Supervision

ACPR : Autorité de contrôle prudentiel et de résolution

SBA : The Sensitivity Based Approach